Villa Ribat bioclimatique – Rabat

Une architecture contemporaine

Anas Koubaiti, architecte

À Rabat, la « Villa Ribat Bioclimatique », signée par Anas Koubaiti architecte et talent confirmé, incarne une approche singulière de l’architecture et de l’habitat. Pensée comme une réponse sensible au climat et au contexte urbain, ce projet illustre une écriture architecturale maîtrisée, où matériaux, lumière et ventilation naturelle dialoguent pour créer un espace à la fois fonctionnel et poétique. Cette vision lui a valu une double consécration lors de la deuxième édition des Young Moroccan Architecture Awards (YMAA), puisque le projet a reçu le prestigieux Prix Zévaco ainsi que la distinction de Bâtiment de l’année. Une reconnaissance méritée pour un projet qui redéfinit les codes de l’habitat durable au Maroc.


Le Ribat Bioclimatique est une œuvre d’architecture domestique qui s’implante dans la capitale marocaine, au sein d’un quartier datant de la seconde moitié du XXᵉ siècle, au sud de Rabat. La parcelle accueillant le projet est restée longtemps une dent creuse dans un tissu urbain déjà constitué, en raison de sa configuration singulière et de son environnement bâti immédiat. Encerclée de maisons individuelles d’un côté, elle fait face, côté rue, à un vis-à-vis imposant à l’ouest, caractérisé par un alignement dense de maisons en bande sur plusieurs niveaux.

Le défi consistait à transformer cette parcelle trapézoïdale, a priori contraignante, en un véritable havre habitable, tout en conciliant les ambitions du projet avec un cadre réglementaire strict. La démarche de conception s’est nourrie du « savoir-habiter » marocain, issu d’un riche héritage architectural et vernaculaire, mobilisant un écosystème dynamique d’artisans et de savoir-faire. Cette approche s’est également construite à travers un dialogue constant avec les autorités urbanistiques, témoignant d’une architecture pensée comme une interface entre tradition et innovation, entre mémoire et contemporanéité.

UNE MAISON SCULPTÉE PAR LA LUMIÈRE ET LES CONTRASTES

Cette maison singulière s’attache à faire coexister un désir d’ouverture et de retrait, articulant des espaces conviviaux pour recevoir amis et famille avec d’autres, plus intimes, propices à la sérénité. Alignée sur la rue, elle arbore une allure monolithique et silencieuse, dont les contours et les arêtes saillantes sont sans cesse redessinés par la course du soleil. Bien que compacte et introvertie de prime abord, cette architecture révèle, une fois franchie son enceinte, une sensualité et une générosité spatiale qui se déploient sur trois niveaux, effaçant les frontières entre intérieur et extérieur.

L’atrium, véritable « wasst eddar », constitue le cœur névralgique de la maison. Véritable pivot spatial, il articule et connecte l’ensemble des niveaux. Son volume spectaculaire, sublimé par un éclairage naturel zénithal filtré par des cheminées solaires, devient un espace sans définition figée, à parcourir dans les trois dimensions, où se joue un éloge théâtral de l’ombre et de la lumière. Les verticalités y sont extrudées, les horizontalités étirées, et les parcours démultipliés, créant une scénographie immersive.

L’architecture se distingue par une matérialité sobre et épurée, fondée sur un jeu subtil de contrastes et de textures qui valorisent des savoir-faire ancestraux. Acier calaminé patiné et ciré, pierre de Taza poncée ou bouchardée, et béton brut s’entrelacent en une composition rigoureuse. Ce dernier, banché de manière artisanale et protégé par une simple lasure hydrofuge, est laissé apparent dedans comme dehors, affirmant ainsi son authenticité brute et intemporelle.

UN HABITAT BIOCLIMATIQUE ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ

a conception de cette architecture domestique s’est également attachée à démontrer la possibilité d’une démarche vertueuse, en proposant une manière d’habiter en phase avec le rythme des saisons. La réflexion sur la vie de l’édifice s’appuie sur une intégration fine des dispositifs spatiaux et architecturaux, visant à garantir un confort optimisé tout en réduisant la consommation d’énergie. En appliquant les principes de l’architecture bioclimatique, la maison orchestre un équilibre subtil entre lumière naturelle et confort thermique, hiver comme été, en tirant pleinement parti des orientations cardinales, du rayonnement solaire et de la circulation aéraulique naturelle.

Ce projet dépasse l’héritage moderniste marocain et s’affranchit du modèle standardisé de l’architecture résidentielle générique, en proposant une interprétation contemporaine du savoir-habiter méditerranéen. Il puise humblement dans la typologie du Riad et ses variantes champêtres, les « menzeh », deux expressions d’un habitat vernaculaire qui, depuis des siècles, façonnent le dialogue entre ombre et lumière, plein et vide, fraîcheur et transparence.

Par son organisation et sa méthode de construction, cette maison se distingue par une clarté conceptuelle et une lisibilité affirmée. Son esthétique épurée renforce la singularité de sa mise en scène, empruntant à la sobriété monolithique des ribats, ces forteresses médiévales qui ponctuent le paysage « Rabati » et ont donné leur nom à la ville. Son allure faussement hermétique intrigue, jouant sur l’ambiguïté entre protection et ouverture, et ne révélant que l’essentiel, dans une approche où chaque détail raconte une intention architecturale maîtrisée.

GALERIE PHOTOS DU PROJET

ARTICLE PAR
CRÉDIT PHOTO © Amine Houari

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