Où vas-tu Corona ? Je t’appelle par ton petit nom puisque nous sommes devenus intimes, Covid-19, ça fait trop officiel, trop solennel et vu comment, à travers notre désinvolture urbanistique et architecturale, nous avons fait tout ce qu’il fallait pour t’offrir sur un plateau un terrain propice à ton confort et expansion à travers nos villes et campagnes, pas de chichis entre nous.
Pour éradiquer les bidonvilles, leur insalubrité et leur densité, nous avons réalisé des logements sociaux, véritables cages à poules, avec, oh surprise ! les mêmes densités et donc encore plus de promiscuité, sans véritables équipements de santé ni d’espaces de loisirs à l’échelle des besoins des populations. Un petit bout de jardin par ci, un semblant de parc par là et du bon béton sale et rugueux pour notre ami Corona, il faut bien qu’il s’accroche à quelque chose.
Nous avons failli, comme d’habitude d’ailleurs ! Failli dans notre manque de vision, failli dans nos aménagements, failli dans nos conceptions.
Oui, je sais, Corona, toi ça t’arrange, mais vois-tu quand on aura fini avec toi et nous en finirons avec toi, bon gré, mal gré, il va falloir qu’on interpelle le plus grand maître d’ouvrage du pays sur ses pratiques, ses idées et surtout sur sa méthodologie de travail : l’Etat.
D’abord sur ses concours pour des constructions pharaoniques de grands CHU dans les grandes villes alors que, vu la pauvreté de certaines régions rurales, l’indigence de leurs habitants et le manque d’équipements, il serait plus judicieux, via de simples consultations ou même de gré à gré de donner aux architectes à réfléchir et concevoir des unités de soins sous forme de petits édifices nombreux, dans des rayons de maximum 60 km des centres ruraux, avec un dispensaire équipé pour les situations d’urgence, une antenne de la gendarmerie et ce que j’appellerai un Bureau d’Assistance Sociale au Citoyen, les gens ne savent pas utiliser les pc, télécharger des documents…
Les SDAU et les PA avec leurs projections macro ont montré leurs limites, il faut zoomer sur tout le territoire, travailler à une échelle micro, les besoins ne sont pas les mêmes, les populations non plus.
Nos urbanistes doivent se remettre à jour, non pas au niveau de la connaissance acquise à l’étranger mais à celui géographique et local de notre pays.
Ce virus se faufile, avec la plus grande facilité, dans les ruelles étroites de nos quartiers populaires et nos médinas, dans les Mokataat mal aérées et mal conçues, dans les cliniques et les hôpitaux faits à la va-vite, à la circulation chaotique, dans nos écoles mal pensées, dans nos hammams dignes du moyen-âge, dans nos souks et marchés à l’hygiène douteuse si ce n’est inexistante.
Le Corona va nous faire souffrir, il va passer mais les bâtisseurs de ce pays doivent revoir leurs copies, leur rôle ne se limite pas à la commande et à l’exécution, il est essentiel au niveau du conseil et des recommandations.
Réfléchissons un peu ! Regardons ce qui se passe dans tous les pays touchés par le Corona : manque d’infrastructures, manques d’espaces et de bâtiments adaptés aux urgences