Hind Lahrichi est une photographe culinaire autodidacte, dont l’aventure créative a débuté il y a quelques années. C’est dans le courant d’une exploration incessante des cultures gastronomiques qu’elle a trouvé sa voie dans la photographie culinaire, capturant avec sensibilité et gourmandise la richesse visuelle de la gastronomie.
Nourrie par des expériences à la portée cosmopolite, son approche artistique s’articule autour de compositions harmonieuses et de colorimétries recherchées. Au-delà de l’objectif, Hind Lahrichi met également en pratique ses connaissances en élaborant ses propres recettes, ajoutant ainsi une dimension encore plus personnelle à son art. Son travail vibrant et évocateur est un témoignage vivant de son amour pour la cuisine et la photographie, suscitant l’admiration et l’inspiration à chaque cliché.
A+E // Pouvez-vous vous présenter brièvement et nous donner un aperçu de votre parcours en tant que photographe?
Hind Lahrichi // Je m’appelle Hind Lahrichi, aussi connue sous le nom de Bichette (et sa cocotte). Je suis photographe autodidacte culinaire à plein temps depuis à peu près 3 ans, j’ai commencé peu avant covid en tant que hobby, c’est devenu une passion puis un full time job.
Après mes études de marketing international, j’ai travaillé un peu partout à Shanghai, New-York, Montréal, Paris; ce qui a grandement développé ma curiosité, mon ouverture d’esprit et mon enthousiasme à découvrir de nouvelles cultures, types de cuisine et même créer mes propres recettes.
A+E // Pourriez-vous élaborer sur votre approche artistique en matière de photographie culinaire ?
H.L // Quand je photographie pour moi, j’aime laisser place à l’émotion de l’image que je capture, un peu sur le vif, ce que j’appelle des “moments figés, volés”. Ce sont en général des scènes qui ne sont pas faciles à reproduire, à reconstruire si on veut les faire de toute pièce. Un instant presque unique. J’aime la lumière naturelle et les sujets dans leur environnement, quels qu’ils soient.
Quand je travaille pour un client, l’approche est différente parce qu’on réfléchit en amont sur une direction artistique bien définie, avec un moodboard. Ça n’enlève en rien la créativité qui naît aussi durant le shooting. En général, j’aime discuter en amont avec le chef ou le propriétaire, pour comprendre quelle est l’expérience qu’ils veulent transmettre et faire vivre aux convives.
Selon le plat, ses couleurs, la forme du récipient, le volume, enfin un peu comme en architecture, je vais travailler autour de ça en fonction de mes inspirations et de mon style photographique, tout en m’adaptant à la direction artistique définie en amont. ll faut avoir beaucoup de patience, un amour visuel pour les plats, manger avec les yeux avant toute chose, comprendre ce que le chef a voulu faire, et suivre « cette danse ».
©Hind Lahrichi
A+E // Comment caractérisez-vous votre esthétique personnelle dans ce domaine ?
H.L // Douceur & émotion. Dévoiler mais tout en timidité, ne pas trop en dire.
A+E // Quels critères esthétiques recherchez-vous lors de la composition d’une image culinaire, et comment les intégrez-vous pour créer une œuvre harmonieuse ?
H.L // Tout dépend de ce que je recherche. Je me pose plusieurs question avant de faire mes premiers shots; quelle est la lumière à ma disposition, est-ce que je veux faire vivre le plat dans son environnement ou est-ce que je veux jouer uniquement sur la géométrie du plat, couleurs et formes et le mettre uniquement lui en avant. Une fois que j’ai la réponse à ces questions là, je passe au côté plus technique. Je travaille en fonction de ce qu’on me sert et non l’inverse (heureusement, sinon je ne serais pas photographe!)
©Hind Lahrichi
A+E // Comment exploitez-vous subtilement la lumière, la palette de couleurs et la diversité des textures pour insuffler une atmosphère particulière ou susciter des émotions dans vos photographies ?
H.L // Je suis photographe autodidacte, donc je suis constamment dans l’apprentissage. Les différentes expériences et la maîtrise des logiciels de post-production évoluent avec le temps.J’ai donc appris comment appliquer la colorimétrie aux sujets que je prenais en photo en fonction des heures de la journée. Chaque heure me donne une différente intensité, une différente couleur. La lumière naturelle reste pour moi d’une magie incroyable.
A+E // Pourriez-vous nous partager une expérience où vous avez créé une photographie culinaire que vous considérez comme particulièrement artistique ou inspirante ?
H.L // Grâce à ma galeriste Meryem Himmich, j’ai pu participer au rencontres photographique de Marrakech 2022, c’était ma première série photographique qui n’était pas issue d’une demande client. Du coup, aucune limite, aucune demande, pas de moodboard, juste moi et mon inspiration. C’était une expérience différente, un peu troublante au début mais tellement satisfaisante de voir le fruit de mon travail exposé.
©Hind Lahrichi
A+E // Enfin, quelle vision avez-vous du rôle de la photographie culinaire dans l’expression artistique contemporaine et dans la construction de la culture visuelle de notre époque ?
H.L // Avec les réseaux sociaux, la photographie culinaire s’est démocratisée, tout le monde peut s’en emparer et créer tout en étant aussi le spectateur. Et puis comme dans tout art, il y a mille et une formes d’expression qui en découle et qui agrémente cette culture visuelle actuelle.
Quand on observe un plat d’un chef étoilé, d’une précision et d’un visuel immaculé, c’est déjà de l’art et le photographier permet d’immortaliser cet art éphémère.
Puis il y a des mondes plus abstraits, qui m’inspirent particulièrement avec leur excentricité (instagram/ @eyeswoon, @gohar.world ,@colinking @ferraronierica). Et enfin les artistes qui floutent de plus en plus les frontières entre la peinture et la photographie.
Je pense que la liste d’exemples est quasi infinie pour montrer à quel point la photographie culinaire a bien sa place dans l’art d’aujourd’hui.