Fouad portait bien son nom, qui signifie « cœur spirituel ». Quel meilleur écrin que cette Église du Sacré-Cœur pour lui rendre hommage ? Car oui, Fouad avait un « sacré cœur ». C’était un homme de bien. Lorsqu’il a répondu à l’appel de l’architecture, il a quitté le confort de son poste chez les cimentiers pour se lancer dans l’aventure de la communication architecturale. Dans notre métier d’architecte, nous savons combien la sensibilité personnelle joue un rôle clé. Au-delà de la pratique, certains deviennent écrivains, artistes, cinéastes… ou parfois tout cela à la fois. Fouad, lui, a choisi de mettre en lumière l’architecture de son pays.
Communicant né, il s’est engagé avec passion et a tracé son sillon, publication après publication, événement après événement. Son sens aigu du travail bien fait transparaissait dans ses conférences et séminaires, qui réunissaient les meilleurs industriels et prestataires du secteur. Ces rencontres étaient des moments privilégiés pour découvrir les dernières innovations et favoriser les échanges entre professionnels, contribuant ainsi à la réussite de nombreux projets. Les architectes ne voulaient jamais manquer ces rendez-vous, de peur que l’actualité leur échappe.
Nous nous souvenons d’une époque où, pour trouver une documentation spécialisée, il fallait se tourner vers des revues françaises comme Architecture d’Aujourd’hui ou Technique et Architecture. Puis Fouad a lancé AM (Architecture du Maroc) et A+E (Architecture + Environnement), offrant ainsi une tribune aux architectes marocains. Peu à peu, la scène architecturale marocaine s’est affirmée et ouverte au monde, donnant une visibilité accrue aux architectes, tant au niveau régional qu’international. Grâce à lui, nombreux sont ceux qui ont osé exposer leurs projets avec fierté, certains concourant même à l’international.
Tout au long de son parcours, Fouad nous a révélés à nous-mêmes et aux autres. Grâce à sa ténacité et au travail remarquable de son équipe chez Archimedia, nous avons aujourd’hui accès à une information actualisée sur l’architecture et le bâtiment. Personne avant lui ne s’y était consacré avec autant de persévérance. Son engagement est devenu une référence incontournable dans notre domaine.
Par souci d’éthique, il avait choisi de ne pas exercer en tant qu’architecte afin d’éviter tout conflit d’intérêt. Son objectif était clair : donner aux architectes les moyens d’améliorer la qualité architecturale du pays. Il nous a tant apporté.

Je voudrais partager un souvenir récent qui illustre bien son caractère. En janvier dernier, il m’a appelé pour me proposer de m’honorer pour mon parcours, comme il l’avait fait précédemment pour nos confrères Mohamed Fikri Benabdallah et Omar Essakalli. Je suis allé le voir chez lui pour en discuter, car il ne se rendait plus à son bureau après une opération lourde. En convalescence, sous surveillance médicale stricte et avec une immunité très faible, il portait en permanence un masque de protection.
Lorsque j’ai vu son état, je lui ai suggéré de reporter l’événement. Mais il était déterminé : tout était déjà organisé. Il m’a rassuré en me disant que sa santé était sous contrôle et qu’il se limiterait aux contacts téléphoniques, laissant son équipe gérer l’événement.
En réalité, il a suivi de près chaque détail des préparatifs. Il m’a même confié qu’un matin, il avait rencontré le chef cuisinier du Marriott pour tester le menu prévu pour la soirée. Son perfectionnisme et son sens du détail ne l’ont jamais quitté. Malgré sa promesse de ne pas intervenir, le jour J, il a pris la parole pour faire les présentations, fidèle à son engagement et à son amour du travail bien fait.

Après cette soirée d’hommage, qui s’est tenue le 5 mars 2024, nous nous sommes revus et il semblait aller mieux. Mais début juin, j’ai appris que son état s’était aggravé et qu’il avait été hospitalisé. Tout s’est passé très vite, et le matin du jeudi 13 juin 2024, un ami commun m’a annoncé la triste nouvelle.
Fouad incarnait l’essence même du dévouement, un militant infatigable qui a porté l’architecture marocaine à bout de bras. Repose en paix, cher Fouad. J’aurais tant aimé te rendre hommage de ton vivant, mais le destin en a décidé autrement.
Enfin, un immense merci à l’équipe d’Archimedia. Fidèles à son esprit, vous avez maintenu la date du 13 juillet 2024 pour l’événement de Tanger, sa ville natale. Grâce à vous, nous avons revécu ces moments qui lui tenaient tant à cœur. Il était là, parmi nous.
Merci.
Rachid Ouazzani, architecte