Co-fondatrice du studio SBLP à Casablanca et Paris, l‘architecte Sara Benrahmoun se livre à nous dans une interview singulière où partage de perceptions et découvertes d’horizons sont les maitres mots. Nous confiant son choix de vie et de carrière, Sara Benrahmoun nous dévoile son leitmotiv ; sensible et passionnée, on retrouve le parcours d’une jeune architecte engagée et consciente de l’impact de ce noble métier.
A+E // Présentez-vous-en quelques mots et parlez-nous brièvement de votre parcours professionnel.
Sara Benrahmoun : « Je m’appelle Sara Benrahmoun, j’ai 31 ans et j’ai obtenu mon diplôme d’architecture au sein de l’ENSA Paris-Val-de-Seine. J’ai ensuite intégré l’agence d’architecture 2/Portzamparc en 2015 et j’y ai collaboré pendant trois ans sur divers projets d’équipements et de logements, tout en développant mes compétences de BIM référent. Après cette première expérience professionnelle, j’ai rejoint l’agence Valode et Pistre architectes où j’ai, entre autres projets, été chargée du permis de construire de la Tour Triangle en collaboration avec l’agence Herzog & De Meuron.
En 2020, j’ai décidé de pratiquer l’architecture en mon nom propre en France et au Maroc, où deux de mes projets sont actuellement en phase chantier. En 2022, j’ai eu l’honneur d’être nommée parmi les 45 architectes émergents du Maroc par la revue A+E Magazine. »
A+E // Quelle est votre définition du métier d’architecte ?
S.B : « Pour moi le métier d’architecte est un métier de contrastes. Les jours s’écoulent et ne se ressemblent jamais. Il y a des moments de doute et des moments d’épiphanie merveilleux. Des moments sérieux où de lourdes responsabilités se conjuguent aux aléas du quotidien et des moments joyeux d’excitation artistique et intellectuelle. C’est un métier qu’on adore détester, qu’on déteste adorer. »
A+E // Quel a été votre motivation vers les études d’architecture ?
S.B : « Plus jeune, je me sentais atypique du fait de mon attirance simultanée pour les arts et la science. J’aimais le dessin, l’écriture, le théâtre, la philosophie, les sciences naturelles, la physique, la chimie avec la même ardeur. A l’âge de 15 ans, j’ai été en voyage à Barcelone pour la première fois. J’y ai visité quelques bâtiments d’Antoni Gaudi dont la Sagrada Familia et la Casa Batlló. J’ai vécu la découverte de cette architecture associant le rêve au réel, les arts et la science, comme une révélation. »
A+E // Pensez-vous avoir fait le bon choix, ou auriez-vous préféré exercer un autre métier ?
S.B : « « Choisir c’est renoncer », disait André Gide. L’architecture était pour moi une évidence mais il y a beaucoup d’autres métiers que j’aurais aimé exercer. »
A+E // Quel autre métier auriez-vous aimé exercer ?
S.B : « Je crois que j’aurais apprécié une carrière d’écrivain ou de philosophe et que j’aurais fait un bon médecin. Mais je crois également que c’est au travers de l’architecture que j’explore le plus de facettes de la vie humaine. Pour moi l’architecture c’est le courage, la recherche du sublime et de la poésie, la prise en compte de l’humain, le lien à la nature, l’expression de la spiritualité. L’architecture est le processus par lequel on donne au banal un supplément d’âme en défendant une vision de l’être au monde. En ce sens, c’est sans doute le choix le plus riche que j’aurais pu faire.»
A+E // Quels conseils pouvez-vous donner aux jeunes futur(e)s architectes ?
S.B : « Osez ! Faites-le ! Exprimez-vous ! Expérimentez ! Ne succombez pas à l’uniformisation de l’architecture en marche à cause des réseaux sociaux. L’architecture n’est pas un produit mais notre cadre de vie à tous ! Votre créativité, votre engagement et votre intégrité intellectuelle sont ce que vous avez de plus précieux. Et surtout, surtout, voyagez ! »
A+E // Qu’avez-vous à dire aux jeunes architectes diplômés à l’étranger qui hésitent à rentrer exercer au Maroc ?
S.B : « Il y a, au Maroc, un territoire infini d’expérimentation et de création architecturale. Votre pays a énormément à vous donner. Venez l’explorer, l’arpenter, le redécouvrir. Vous y trouverez un trésor d’opportunités pour développer vos compétences et votre identité architecturale. »
A+E // Quel changement majeur pensez-vous qu’il serait nécessaire de faire dans le domaine de l’architecture au Maroc ?
S.B : « Je crois qu’il serait temps de donner à l’architecture des logements sociaux la place et la considération qu’elle mérite afin d’offrir un cadre de vie digne et durable aux marocains. »
Dans une atmosphère plus légère, Sara Benrahmoun a répondu à nos questions de manière spontanée, nous faisant découvrir un peu plus sa personne et sa personnalité.
A+E // Le métier d’architecte en 1 mot ?
S.B : « Passion »
A+E // Le métier d’architecte en 1 proverbe ou citation ?
S.B : «Je conçois des choses qui restent gravées dans l’âme des hommes pour l’éternité », Tadao Ando
A+E // Si le métier d’architecte était une personne ou un personnage ?
S.B : « Imhotep, le premier architecte connu qui était également médecin et philosophe. J’aurais aimé pouvoir exercer ces trois métiers à la fois. »
A+E // Le métier d’architecte en 1 poème ?
A+E // Au final être architecte c’est ……. ?
S.B : « Se poser continuellement des questions, cerner ses propres réponses, les découvrir. »