Jadis jardin nourricier et poumon de la ville rouge, la Palmeraie est aujourd’hui synonyme de villégiature et de demeures toutes plus fastueuses les unes que les autres, réunissant le gotha du Maroc et du monde entier. Au coeur de ce site menacé s’étend un double projet : deux villas d’exception pensées et réalisées par Armand Ben David et Christophe Siméon. Zoom sur la Villa Nord.
L’accès au projet se fait par une petite route cheminant à travers une nature miraculeusement conservée, aux oliviers plus que centenaires et offrant de très belles vues sur l’Atlas. Cette portion quasi intacte de l’oasis marrakchie témoigne de sa richesse et de son abondance originelle. Cette voie a été spécialement réaménagée par les architectes avec l’aide de la commune, et porte le nom évocateur de « Jnanate » (les vergers).
Le site est constellé de constructions antinomiques : d’un côté naissent des projets d’exception comme des hôtels de charme et des villas luxueuses, de l’autre fleurissent de petits « douars » informels, conséquence de l’exode rural, le tout desservi par de petites routes bucoliques à travers la Palmeraie.
Le projet se situe sur un terrain de plus de 2 hectares divisé dans le sens de la hauteur en deux parties égales (partie est et partie ouest). Chacune contient un programme sensiblement équivalent : une maison grandiose organisée autour de patios, contenant quatre chambres à coucher dont une suite à l’étage, une piscine chauffée de 25 mètres de longueur, un lac artificiel et des dépendances (pavillon de piscine avec hammam, pavillon invités, logement du personnel…). La Villa Nord, dont il est question ici, occupe comme son nom l’indique, la partie nord du terrain se trouvant à l’est.
Le premier contact visuel avec le bâtiment est sa façade nord : un cadre blanc au centre d’une muraille couleur terre, au soubassement de pierre et percée de meurtrières, invite le visiteur à passer au travers de cette fenêtre accueillante et prometteuse. L’entrée se fait par une large volée d’escaliers en pierre de Taza à travers cet épais cadre blanc, ouvrant son portail de persiennes en acier brun sur une perspective enchanteresse.
Aussitôt franchi le hall d’entrée, on se trouve au centre de ce qu’on pourrait qualifier de double patio : sur la partie droite se trouve un large bassin, au pied d’une immense baie vitrée laissant entrevoir une salle à manger monumentale. Sur la partie gauche, une volée d’escaliers dessert un niveau inférieur planté de palmiers et de bananiers, dont on aperçoit les palmes frémissantes.
Le patio est encadré de deux galeries parallèles bordées de colonnes épurées. La galerie nord dessert à l’une de ses extrémités, par une porte en noyer d’inspiration berbère, une cuisine ouverte sur la salle à manger. À l’autre bout, elle dessert les chambres de service.
La seconde galerie côté sud est vitrée. Elle distribue trois chambres, chacune avec cheminée, salle de bain, vue et accès direct au jardin; une pièce avec « home cinéma », un salon avec cheminée donnant directement sur la piscine, ainsi qu’un petit salon d’hiver avec cheminée centrale circulaire en acier.
L’étage est, lui, consacré à une vaste suite avec chambre à coucher, cheminée, salon et salle de bain, mais son principal atout est sans conteste sa vue imprenable sur les champs d’oliviers et les neiges qui ourlent les crêtes de l’Atlas.
Tel un rempart qui ceinture le bâtiment, le mur en terre au niveau du RDC est rythmé de meurtrières. Des cubes blancs aux ouvertures traversantes dépassent en hauteur et percent la muraille en quinconce sur la façade sud.
L’ensemble des volumes composant le projet respecte une orientation nord-sud, ménageant des espaces de qualité et des terrasses paysagées protégées par des pergolas en chêne massif, créant ainsi un maximum d’intimité pour chaque zone de la vaste maison.
Pour un meilleur confort thermique tout au long de l’année, les baies vitrées orientées au sud sont en retrait. Les faux plafonds intègrent une climatisation réversible l’hiver, et les sols sont eux aussi chauffés. La piscine l’est elle aussi grâce à des pompes à chaleur.
Selon les architectes, le rapport entre une bonne orientation, l’implantation du bâti et la recherche de l’harmonie des volumes est le premier pas vers une architecture durable répondant à des préoccupations écologiques. « La richesse immense du patrimoine architectural marocain et régional est le socle des réflexions et des choix architecturaux du projet. L’étude des ouvrages traditionnels, des éléments architectoniques du bâti à Marrakech nous a permis de concevoir une architecture moderne s’inspirant largement du vocabulaire local ».
Depuis sa création par la dynastie Almoravide au XIe siècle, la Palmeraie n’a jamais été aussi célèbre et menacée de son histoire. Des programmes de réhabilitation sont en cours pour restituer les systèmes d’irrigations ancestraux et replanter des milliers de palmiers.
La Palmeraie, demain, retrouvera finalement de sa superbe ; quant à la ville impériale, elle continue à abriter, comme à son origine, des demeures légendaires et raffinées.
FICHE TECHNIQUE
MAîTRISE D’OUVRAGE | MATTI & MIMRAM |
MAîTRISE D’OEUVRE | CHRISTOPHE SIMEON & ARMAND BEN DAVID |
SITUATION | MARRAKECH – MAROC |
SURFACE COUVERTE | 1200 M2 |
LIVRAISON | 2014 |
COUT | 21 000 000 DH |