Francis Kéré, premier architecte africain lauréat du Pritzker Prize, poursuit au Togo une réflexion engagée sur les architectures contextuelles, climatiques et communautaires. Originaire de Gando (Burkina Faso), il développe une pratique attentive aux ressources locales, aux traditions constructives et à la participation des usagers. Son nouveau projet à Notsé, le Centre des Cultures et Spiritualités Ewés (CCSE), s’inscrit dans cette continuité en articulant héritage, identité et innovation.
UN ÉQUIPEMENT POUR STRUCTURER ET TRANSMETTRE L’HÉRITAGE EWÉ
Situé à quatre-vingts kilomètres au nord de Lomé, le CCSE vise à rassembler les composantes essentielles de la culture ewé : espaces rituels, temples, zones communautaires et future reconstitution du palais royal. L’ensemble propose un cadre destiné à accueillir pratiques spirituelles, cérémonies, moments d’apprentissage et rencontres publiques.
Le projet s’inscrit ainsi dans une stratégie de préservation active : offrir une architecture capable d’accompagner la transmission des savoirs et des rites dans des conditions adaptées aux usages contemporains.


UNE ARCHITECTURE ANCRÉE DANS LE SITE ET LA SYMBOLIQUE
L’entrée monumentale reprend la géométrie du tabouret royal ewé, figure d’autorité dans la tradition du royaume. Cet élément sert de seuil et de repère, inscrivant le projet dans un continuum symbolique clair.
Les bâtiments sont majoritairement construits en latérite rouge, matériau local dont Kéré exploite les qualités d’inertie, de régulation thermique et de mise en œuvre. Volumes bas, épaisseurs filtrantes, ombrages profonds et patios végétalisés structurent l’ensemble et organisent la ventilation naturelle. Cette approche permet une réponse climatique précise tout en assurant une forte cohérence paysagère.

UN OUTIL CULTUREL POUR DES USAGES ÉTENDUS
Le centre intégrera également des espaces dédiés à la culture et à la création contemporaine : salle d’exposition, auditorium, amphithéâtre extérieur et lieux polyvalents pour conférences, ateliers ou événements publics. Cette hybridation programmatique vise à renforcer le rôle du CCSE comme infrastructure culturelle régionale, complémentaire de sa vocation spirituelle.
Les travaux, engagés en octobre 2024, devraient s’achever en février 2026. Le chantier associe artisans locaux et techniques traditionnelles, dans une continuité logique avec la démarche de Kéré, fondée sur l’économie des moyens, la pertinence constructive et l’implication des communautés.

Le Centre des Cultures et Spiritualités Ewés s’affirme ainsi comme un équipement structurant, articulant transmission, ancrage territorial et usages contemporains, et illustrant la manière dont une architecture contextuelle peut accompagner l’évolution d’un patrimoine vivant.





